AU NOM DE LA REPUBLIQUE  D'ARMENIE

L'ARRET

DE LA COUR CONSTITUTIONNELLE DE LA REPUBLIQUE D'ARMENIE

SUR L’AFFAIRE DE CONFORMITE  DES DISPOSITIONS  DE L’ABOLITION DE LA PEINE DE MORT DU PROTOCOLE N 6 A LA CONVENTION  DE SAUVEGARDE DES DROITS DE L’HOMME  ET DES LIBERTES FONDAMENTALES  SIGNES A STRASBOURG LE 28 AVRIL 1983 A LA CONSTITUTION DE LA REPUBLIQUE D’ARMENIE

 

EREVAN                                                                                      Le 15 juillet 2003

La Cour constitutionnelle de la République d’Arménie présidée par le président de la Cour constitutionnelle G.HAROUTUNIAN composée par: le vice-président de la Cour constitutionnelle V.HOVHANNISSIAN, les membres de la Cour constitutionnelle, F. TOUKHIAN, Z. GHOUKASSIAN, H.NAZARIAN, V. POGHOSSIAN, V.SAHAKIAN, M. SEVIAN

avec la participation, du représentant officiel du Président de la République d’Arménie, le ministre de la justice de la République d’Arménie D HAROUTUNIAN,

conformément aux dispositions de l’alinéa 2 de l’article 100, de l’alinéa 1 de l’article 101 de la Constitution de la République d’Arménie, de l’alinéa 2 de l’article 5, de l’alinéa 1 de l’article 25, de l’article 56 de la loi  de la République d’Arménie sur “La Cour constitutionnelle”

la Cour constitutionnelle à sa session  publique  a examiné l’affaire  sur la conformité  des dispositions  de l’abolition de la peine de mort du Protocole N 6 de la Convention de Sauvegarde des Droits de l’homme  et des Libertés Fondamentales  signée à Strasbourg le 28 avril 1983 à la Constitution de la République d’Arménie

L’affaire était initiée par la saisine à la Cour constitutionnelle du Président de la République.

Après avoir entendu  le communiqué du rapporteur de cette affaire le vice-président  de la Cour constitutionnelle V.HOVHANNISSIAN, les explications du représentant du Président de la République d’Arménie, le ministre de la justice de la République d’Arménie  D.HAROUTUNIAN, ainsi qu’en étudiant le procès-verbal et d’autres documents présents dans le dossier la Cour constitutionnelle d’Arménie a  ETABLI:

1.La République d’Arménie en adhérant au statut du Conseil de l’Europe du 5 mai 1949 ainsi qu’à la Convention de Sauvegarde des Droits de l’homme  et des Libertés Fondamentales et aux Protocoles additionnels 1, 4, et 7 s’est engagée à reconnaître dans son pays la prééminence du principe du droit et en exécution  de ce principe à mettre en œuvre la réforme des institutions publiques et la démocratisation  continue de la vie sociale et politique du pays  poursuivant l’objectif de les mettre en conformité aux critères internationaux en vigueur dans les pays européens.

La République d’Arménie a signé le Protocole  N 6 relatif à l’abolition de la peine de mort le 25 janvier 2001.

L’objectif du Protocole N 6 est d’entériner le principe de l’abolition de la peine de mort  pour les pays adhérant comme l’engagement de l’exécution obligatoire. Le pays adhérant au Protocole est obligé d’exclure de sa législation la peine de mort comme sanction. Cependant le Protocole autorise le pays adhérant d’envisager dans sa législation la peine de mort  pour les actes commis pendant la guerre ou la menace  inévitable de la guerre. Dans les cas identiques la peine de mort ne sera  appliquée que dans les cas prévus par cette législation et conformément à ses dispositions.

D’après le Protocole N 6 le pays dont la législation prévoit la  disposition de la peine de mort est obligé de communiquer au Secrétaire Général du Conseil de l’Europe les dispositions afférentes de la législation en cause.

L’article 15 de la Convention européenne des droits de l’homme permet aux pays adhérant « en cas de  guerre ou  en cas d’autre danger public  menaçant  la vie de la nation  » de prendre des mesures dérogeant aux obligations fixées par la Convention. L’article 3 du Protocole N 6 prévoit qu’aucune dérogation n’est autorisée aux dispositions du présent Protocole à l’exception des cas envisagés dans l’article 2 du Protocole au titre de l’article 15.

Le Protocole  N 6 est « additionnel » et ne peut pas remplacer  l’article 2  de la Convention européenne des droits de l’homme.

L’article 4 du Protocole N 6 dispose qu’aucune réserve n’est admise aux dispositions du présent Protocole en vertu de l’article 57 de la Convention européenne des droits de l’homme.

2. La République d’Arménie après la déclaration de son indépendance en adhérant aux traités internationaux, régionaux importants portant sur la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales a reconnu l’homme sa vie et  sa santé,   son honneur et sa dignité, son inviolabilité et sa sécurité en tant que  valeurs sociales suprêmes. 

3. La Constitution de la République d’Arménie est le garant  juridique suprême de sauvegarde des droits de l’homme dont les articles 14-48 sont consacrés aux droits et aux libertés principales de citoyen et l’article 4 proclame que l’Etat assure la défense des libertés et des droits de l’homme conformément à la Constitution et aux lois, aux normes et principes juridiques internationaux.

Dans le système des droits garantis par la Constitution la protection du droit à la vie est aussi notée. La Constitution considérant ce droit  comme absolu et inaliénable dans son article 45 fixe qu’en aucun cas le droit à la vie ne peut pas être restreint.

L’article 17 de la Constitution dispose que toute personne a le droit à la vie et en protégeant ce droit n’admet qu’une seule dérogation concernant  la peine de mort. C’est la disposition fixée dans le même article 17 proclamant que « la peine de mort jusqu’à son abolition comme une sanction suprême peut être définie par la loi pour les crimes extrêmement graves ».

4. Comme l’analyse systémique de la Constitution de la RA ainsi que l’étude du contenu des traités internationaux  témoignent que la République  en tant que  facteur de garantie du droit à la vie récuse la peine de mort comme sanction et fixe l’abolition de la peine de mort comme norme-objectif.

En conditionnant l’abolition de la peine de mort par la nécessité de changement des certaines valeurs dans la conscience collective dont l’un des éléments importants est le facteur du temps l’article 17 de la Constitution autorise la peine de mort comme une sanction « temporaire » et « exceptionnelle » et pour « les crimes extrêmement graves » En même temps d’après l’article17 de la Constitution la peine de mort comme une sanction exceptionnelle peut être définie par la loi.

5. Puisque d’après l’article 62 de la Constitution de la RA le pouvoir législatif est exercé par l’Assemblée Nationale, la Constitution réserve à l’Assemblée Nationale la prononciation ou non de la peine de mort en cas des crimes graves. Du point de vue juridique ce fait sous-entend que l’Assemblée Nationale  à tout moment peut abolire la peine de mort comme sanction pour un crime, ainsi que pour tous les crimes commis. Les autres articles de Constitution  ne prévoient aucunes  conditions et ne créent pas d’obstacles pour l’exercice de cette compétence  par l’Assemblée Nationale.

6.Comme de l’aspect théorique, aussi bien que de l’aspect pratique, l’Assemblée Nationale de la République d’Arménie peut en exerçant dans le cadre de ses compétences résoudre  la question de prononciation des sanctions pour les crimes pénales, moyennant la ratification ou la dénonciation des traités internationaux.

L’Assemblée Nationale de la République d’Arménie se fondant sur la disposition de l’article 6 de la Constitution énonçant que les traités internationaux que la RA a ratifié l’emportent sur les lois de la RA est compétent de ratifier de tel traité international dont les dispositions prévoient des sanctions que leur définition ou leur application soient différentes des sanctions prévues par le Code pénal de la RA.

Les traités ratifiés par la RA ne peuvent pas modifier les dispositions concernant  l’ordre de définition des sanctions prévues par la Constitution de la RA.

7. Vu que la prévision temporaire de la peine de mort d’après l’article 17 de la Constitution est sous le réserve de la volonté de l’Assemblée Nationale et elle est compétente de modifier des fondements juridiques de régulation des relations juridiques non seulement par la modification du système législatif de la RA, mais aussi par le moyen de ratification ou dénonciation des traités internationaux, ainsi  l’examen et la résolution des questions concernant la ratification ou la dénonciation des traités internationaux portant sur l’abolition de la peine de mort ou prohibant la peine de mort prévue comme sanction temporaire par la Constitution de la RA, sont pleinement dans le cadre des compétences de l’Assemblée Nationale de la RA.

Partant des résultats de l’examen de l’affaire, se fondant sur l’alinéa 2 de l’article 100, et la première et troisième parties de l’article 102 de la Constitution de la de la République d’Arménie, ainsi que sur l’alinéa 2 de l’article 5, les articles 67 et 68 de la loi de la République d’Arménie sur « la Cour constitutionnelle» La Cour constitutionnelle de la République d’Arménie DECIDE:

1.     Les dispositions  de l’abolition de la peine de mort du Protocole N 6 de la Convention de Sauvegarde des Droits de l’homme  et des Libertés Fondamentales  signée à Strasbourg le 28 avril 1983 sont conformes à la Constitution de la République d’Arménie

2.  Aux termes du deuxième paragraphe de l’article 102 de la Constitution de la République d’Arménie le présent arrêt est définitif, ne peut être revu et entre en vigueur dès sa publication.

 

PRESIDENT DE LA COUR 
CONSTITUTIONNEL
LE
DE LAREPUBLIQUE D’ARMENIE
G.HAROUTUNIAN

 

15 juillet 2003
DCC - 437